Caractère du Prophète

Que dit l’Islam à propos des prisonniers de guerre ?

Les prisonniers de guerre subissent souvent de mauvais traitements lors des conflits. L’humanité et le respect du Saint Prophète Muhammad (s.a.w.) à leur égard demeurent inégalés dans l’histoire.

« Tout est permis en amour et en guerre » est un proverbe qui vous est peut-être familier. Cette expression semble suggérer que l’on peut agir comme bon nous semble en temps de guerre sans devoir en répondre. Cependant, l’Islam ne souscrit pas à cette affirmation. Même en temps de conflit, les musulmans doivent surveiller leur comportement, et il existe des règles strictes que l’armée musulmane doit respecter.

La capture de prisonniers est l’une des conséquences de la guerre. Que dit l’Islam à ce sujet ? Le Coran rejette fermement l’emprisonnement, sauf en cas de guerre totale en affirmant : « Il ne sied pas à un Prophète qu’il ait des captifs avant qu’il n’ait pris part à une bataille régulière dans le pays. » [1]

La pratique du Prophète Muhammad (s.a.w.)

Avant l’avènement de l’Islam, les tribus du Hedjaz capturaient fréquemment des individus, même en dehors des périodes de guerre, pour les réduire en esclavage à perpétuité. Dans notre monde moderne, le traitement réservé aux prisonniers de guerre par certaines nations n’a rien de glorieux non plus. Les nations qui les capturaient les torturaient, les gardaient dans des conditions inhumaines, voire les exécutaient tout simplement. Les injonctions du Saint Prophète (s.a.w.) et de l’Islam à ce propos sont sans précédent dans l’histoire de l’humanité.

Soixante-dix prisonniers ont été capturés par les musulmans au cours de leur première bataille régulière contre les Mecquois. En l’absence de système pénitentiaire en Arabie à l’époque, le Saint Prophète Muhammad (s.a.w.) a réparti les prisonniers entre les compagnons leur ordonnant de les traiter avec bonté et d’en prendre soin.

Abou Aziz bin Oumayr était l’un de ces 70 captifs. Voici la description de sa détention entre les mains des musulmans : « Sur ordre du Saint Prophète, les Ansar (les musulmans originaires de Médine) me donnaient du pain cuit, tandis qu’ils se contentaient de dattes, etc. Souvent, même s’ils réussissaient à obtenir un petit morceau de pain, ils me le donnaient et n’en mangeaient pas eux-mêmes. Si parfois je le leur rendais par embarras, ils insistaient pour que je le reprenne. » [2]

Même Sir William Muir, orientaliste et critique véhément de l’Islam, qui ne manquait jamais de formuler des allégations, a reconnu et salué les actions de ces musulmans. Dans sa biographie intitulée « The Life of Mohammad », il évoque les conditions de vie des prisonniers de Badr : « Conformément à l’ordre de Mohammad, les citoyens [de Médine] et les réfugiés qui avaient des maisons ont accueilli les prisonniers avec gentillesse et considération. « Bénis soient les hommes de Médine », dira l’un d’entre eux plus tard : « Ils nous ont fait monter à cheval, tandis qu’eux-mêmes marchaient ; ils nous ont donné du pain de froment à manger quand il y en avait peu, se contentant de dattes. » Il n’est donc pas surprenant que certains des captifs, sous l’influence de ces gestes bienveillants, aient choisi de devenir croyants, et leur liberté leur a été immédiatement accordée. Les autres ont été gardés en captivité en attendant une rançon. Cependant, il a fallu attendre longtemps avant que les Qouraychites n’aient l’humilité de se rendre à Médine dans ce but. Le traitement bienveillant s’est donc prolongé, laissant une impression favorable dans l’esprit de ceux qui ne sont pas immédiatement devenus musulmans […] Les captifs ont été rachetés en fonction de leurs moyens, certains payant jusqu’à mille pièces, d’autres jusqu’à quatre mille pièces. Ceux qui n’avaient rien à offrir ont été libérés sans paiement […] Dix garçons ont été affectés à chacun d’entre eux pour leur enseigner l’écriture, et cette formation a été acceptée comme une forme de rançon de leur part. » [3]

Réfléchissons un peu à ce que William Muir vient de mentionner. Les musulmans, vainqueurs de la bataille de Badr, sont rentrés à pied à Médine, parcourant environ 130 kilomètres, tandis que les prisonniers, qui avaient été vaincus lors de la bataille, chevauchaient leurs montures. Les musulmans, face au manque de pain, ont privilégié les prisonniers en se contentant de dattes plutôt que de manger eux-mêmes. Peut-on citer un tel exemple dans toute l’histoire connue des conflits armés ?

À leur arrivée à Médine, les prisonniers furent attachés aux piliers de la mosquée à Médine. Parmi eux se trouvaient certains membres de la famille du Saint Prophète Muhammad (s.a.w.) dont Abbas, son oncle, Aquil, son neveu et Aboul ‘Aas, son gendre. La nuit, le Saint Prophète (s.a.w.) ne put dormir en raison des gémissements d’Abbas (r.a.). Lorsque les Ansar l’apprirent, ils desserrèrent ses liens, et il cessa de gémir. Quand le Saint Prophète (s.a.w.) en découvrit la raison, il ordonna à ses compagnons : « Si vous avez desserré ses liens, faites-en de même pour tous les autres. Abbas ne mérite aucun traitement de faveur ».

Il s’agissait du même Abbas qui était non seulement l’oncle et l’ami du Saint Prophète (s.a.w.), mais qui avait également soutenu les musulmans pendant leur périlleux boycott à La Mecque, en leur fournissant secrètement de la nourriture et de l’eau. Les chefs des Qouraysh l’avaient contraint d’accompagner l’armée de La Mecque. Si quelqu’un méritait d’être libéré ou de bénéficier d’un répit, c’était bien Abbas ! Les Ansar demandèrent même au Prophète (s.a.w.) si Abbas pouvait être libéré sans rançon, mais le Prophète (s.a.w) refusa : en accord à loi de l’Islam, il faisait montre d’une justice absolue, la pierre angulaire de la paix dans le monde.

Bien que l’Islam offre des directives sur la conduite à adopter en cas de guerre, il interdit strictement d’en déclencher une. Les musulmans ont été contraints de participer à la bataille de Badr, car l’armée mecquoise avait lancé une attaque contre eux. Les conséquences des conflits, à court comme à long terme, sont terrifiantes, comme tragiquement illustré par les deux guerres mondiales. D’innombrables civils innocents ont péri sans faute de leur part. Les technologies militaires actuelles amplifient de manière exponentielle le nombre de victimes. Ainsi, l’Islam condamne la guerre et souligne l’impératif de la communauté internationale de collaborer afin de mettre un terme à toute agression, quel qu’en soit l’auteur. En tant que religion universelle, l’Islam aspire à apporter des bienfaits à toute l’humanité en enseignant les principes favorisant l’établissement d’une paix durable. Considérant que les grandes puissances ont tenté diverses méthodes pour instaurer la paix sans succès, il serait judicieux d’explorer ce que l’Islam pourrait offrir si elles sont sérieuses dans leur volonté d’atteindre la paix mondiale.


À propos de l’auteur : Zafir Malik est rédacteur en chef adjoint de The Review of Religions. Il est diplômé de Jamia Ahmadiyya UK — Institute of Modern Languages and Theology. Il est également imam de la communauté musulmane Ahmadiyya et intervient régulièrement en tant que panéliste sur la chaîne MTA International et la radio Voice of Islam.


[1] Le Saint Coran, chapitre 8, verset 68

[2] Abu Ja’far Muḥammad bin Jarir Al-Ṭabari, Tarikh al-Rusul wa al-Muluk, Liban, Dar al-Fikr, 2002, vol. 3, p. 40

[3] Sir William Muir, Life of Mohammad, Edinburgh, Oliver and Boyd, 1923, p. 233-234